Kinshasa retient son souffle — encore une fois. Le 23 octobre dernier, la Première ministre Judith Suminwa a apposé sa signature sur un contrat clinquant avec le consortium Sino-Congo Special Zone (SCSZ). En jeu : la naissance d’une Cité industrielle Chine-Congo, présentée comme la locomotive d’une nouvelle ère urbaine. 430 km² de promesses bétonnées, de zones industrielles et agropastorales, d’espaces verts, de rêves résidentiels et de logistiques futuristes. Une vitrine de modernité sur papier. Mais à Kinshasa, on connaît trop bien la chanson.
Combien de fois a-t-on déjà assisté à ce grand théâtre du “développement” où chaque ministre, chaque entrepreneur étranger, chaque président, promet de transformer la capitale en Dubaï d’Afrique ? On nous ressort les mêmes maquettes, les mêmes discours, les mêmes illusions. On rebaptise, on relance, on signe — et puis, plus rien. Le béton reste virtuel, les terres s’assèchent, et les espoirs s’effritent.
Souvenons-nous : Kitoko City. La fameuse “ville intelligente” présentée en grande pompe à l’Expo Béton 2021. Une cité verte, futuriste, connectée, où devaient s’installer les institutions du pays et les logements de la diaspora. Un projet censé redéfinir la Gombe, déplacer le centre politique, moderniser la capitale. Cinq ans plus tard ? Pas une pierre. Pas un mur. Seulement des PowerPoint poussiéreux et des hectares de rêves étouffés sous la corruption, la bureaucratie et les querelles d’intérêts.
Et aujourd’hui, les mêmes ministères, les mêmes acteurs, les mêmes promesses remettent le couvert. On change juste le nom sur le contrat, on rajoute un drapeau chinois, et on recommence à vendre du rêve à un peuple qui manque d’eau, d’électricité et de logements décents. À ce rythme, Kinshasa risque de devenir la capitale mondiale des projets fantômes.
La Cité industrielle Chine-Congo, nous dit-on, va transformer le visage de la ville. Très bien. Mais avant de célébrer, exigeons des comptes. Combien de “Kitoko City” inachevées faut-il encore pour comprendre que le développement, ce n’est pas un slogan ? Qu’il ne suffit pas de signer, mais de construire ? De planifier, de suivre, d’exécuter ? Pour plusiuers kinois juste à force de croiser les doigts, Kinshasa risque de se fracturer les poignets.
Par kilalopress