La rivière Ikelemba, située dans la province de l’Équateur en République Démocratique du Congo, regorge d’une biodiversité aquatique exceptionnelle, mais cette richesse est aujourd’hui mise à mal par des facteurs environnementaux. Une récente étude menée par une équipe de chercheurs congolais a mis en lumière la diversité des espèces de poissons présentes dans cette rivière, tout en soulignant les variations saisonnières de la production halieutique et les défis auxquels ces écosystèmes aquatiques sont confrontés.
Au total, 942 spécimens de poissons ont été capturés lors de l’étude, appartenant à 11 ordres, 18 familles et 32 espèces différentes. Les résultats révèlent une biodiversité riche et variée, dominée par l’ordre des Siluriformes (poissons-chats), suivi des Cypriniformes et des Perciformes. Parmi les familles les plus représentées figurent les Clariidae, qui comptent à elles seules six espèces, ainsi que les Anabantidae et Mormyridae, avec quatre espèces chacune. voici le lien de l’etude:https://ijpsat.org/index.php/ijpsat/article/view/6725
Les poissons-chats, avec leur grande variété d’espèces, semblent être particulièrement bien adaptés aux conditions de la rivière Ikelemba, dont les eaux sont particulièrement riches en ressources. Mais malgré cette diversité, les chercheurs alertent sur les dangers que représentent les perturbations saisonnières et humaines pour la stabilité de cet écosystème fragile. L’une des conclusions les plus marquantes de l’étude est l’impact de la saisonnalité sur la population de poissons de la rivière. Durant la période de décrues, lorsque les eaux de la rivière baissent, les chercheurs ont observé un pic de production halieutique, avec 62,9% des poissons capturés pendant cette période. En revanche, pendant la période de crues, lorsque le niveau de l’eau monte, la capture des poissons chute significativement, ne représentant que 37,1% de l’effectif total.
Les scientifiques expliquent que ces variations saisonnières ont un impact direct sur la disponibilité des ressources alimentaires et les habitats des poissons. Pendant la décrue, les poissons sont concentrés dans des espaces plus réduits, facilitant ainsi leur capture. En période de crues, la dispersion des poissons dans les zones plus vastes rend la pêche plus complexe. L’étude a également mesuré la diversité de Shannon-Weaver, un indicateur clé qui permet de quantifier la richesse et l’équilibre des espèces dans un écosystème. Pendant la période de décrues, l’indice a atteint 3,1 ± 0,12, tandis qu’en période de crues, il a légèrement diminué à 2,9 ± 0,07. Bien que les deux périodes montrent une grande diversité, la décrue semble favoriser une plus grande stabilité dans la distribution des espèces.
L’équitabilité de Piélou, qui mesure l’égalitarisme de la répartition des espèces, a également montré une légère différence : 0,93 ± 0,01 en période de décrues contre 0,9 ± 0,04 en période de crues, indiquant une répartition des espèces plus uniforme lorsque le niveau de l’eau est plus bas. Ces résultats soulignent la résilience de l’écosystème en période de décrue, mais montrent également qu’en période de crue, des déséquilibres peuvent apparaître, notamment en raison des changements dans l’habitabilité et la disponibilité des ressources.
Les poissons les plus abondamment capturés durant l’étude sont des espèces telles que P. obscura (9,7% des captures), P. microphthalmus (9%), P. pelligrini (7,3%) et C. gariepinus (5,4%), également connu sous le nom de silure africain, une espèce prisée dans les régions du bassin du Congo. Ces espèces jouent un rôle essentiel dans l’équilibre écologique de la rivière Ikelemba, servant à la fois de prédateurs et de proies, contribuant ainsi à maintenir la dynamique de la chaîne alimentaire locale. Cependant, cette richesse ichtyologique est de plus en plus menacée par plusieurs facteurs, notamment la pêche non durable, la pollution et les changements climatiques qui affectent le régime des crues et des décrues.
Cette étude met en lumière l’importance de préserver les écosystèmes aquatiques de la rivière Ikelemba, non seulement pour leur biodiversité exceptionnelle, mais aussi pour les communautés locales qui dépendent de la pêche comme source principale de subsistance. Les résultats suggèrent qu’une gestion durable des ressources halieutiques et une meilleure régulation de la pêche, surtout pendant les périodes de crues, sont essentielles pour assurer la pérennité de ces écosystèmes. Les autorités locales et les organisations environnementales doivent renforcer les mesures de conservation, surveiller les pratiques de pêche et promouvoir des techniques respectueuses de l’environnement. En parallèle, des initiatives visant à sensibiliser les populations locales aux enjeux de la biodiversité et à l’importance de la préservation des milieux aquatiques sont cruciales pour garantir un avenir plus équilibré et durable pour la rivière Ikelemba.
Par kilalopress