Près de 35 000 tonnes de cacao ont été exportées illégalement de l’Ituri vers l’Ouganda depuis le début de l’année. Cette fuite massive de richesse fragilise non seulement l’économie congolaise, mais accentue aussi la pression sur les forêts et alimente l’instabilité dans la région.
Le ministre de l’Agriculture, Muhindo Nzangi, en déplacement à Bunia le 6 septembre, a sonné l’alarme : des cargaisons entières de cacao quittent l’Ituri par des voies clandestines, notamment par le lac Albert, à destination des villes ougandaises de Toronko et Rwabisengo. L’État congolais perd ainsi des recettes fiscales cruciales, tandis que les producteurs locaux, eux, restent piégés dans la précarité.
La Nouvelle Société Civile de Mambasa tire également la sonnette d’alarme : une partie du cacao sert de monnaie d’échange aux groupes armés. Dans les territoires d’Irumu et de Mambasa, les milices pillent, volent et contrôlent des parcelles pour financer la guerre. « Sans une brigade spéciale de protection des producteurs, le cacao continuera d’alimenter les violences », prévient l’organisation.
Derrière l’économie parallèle du cacao se cache un autre danger, plus silencieux : la déforestation. Pour planter, des pans entiers de forêt ont été rasés, privant la région de sa biodiversité et fragilisant les sols. La contrebande, loin de favoriser un commerce durable, pousse les producteurs vers des pratiques agricoles non encadrées, accentuant la dégradation des écosystèmes.
Pourtant, le cacao pourrait être un levier de développement durable en Ituri. S’il était valorisé légalement, il offrirait aux communautés rurales une alternative à l’exploitation forestière illégale et favoriserait des modèles agroforestiers respectueux de l’environnement. Mais tant que la contrebande régnera, le cacao continuera de symboliser un paradoxe : une richesse agricole qui appauvrit l’État, détruit la forêt et finance la guerre.
Par kilalopress