Bukavu : Clôture de la Formation- APEM et KilaloPress Viennent de Breveter 16 Journalistes Blogueurs pour Lutter Contre la Criminalité Environnementale transfontaliere dans le sud-kivu

Sud-Kivu, RDC — Le 23 mai 2025 marque un tournant pour le journalisme environnemental dans les zones transfrontalières. Après cinq jours de formation intensive, 16 journalistes, dont 6 femmes, ont été honorés par la remise de brevets attestant de leurs nouvelles compétences en matière de protection environnementale, de reportage et de lutte contre les crimes écologiques. Une initiative saluée par tous les participants et qui s’impose comme un jalon dans la lutte pour la sauvegarde des écosystèmes menacés.

Organisée par l’Action pour la Promotion et la Protection des Peuples et Espèces Menacés (APEM) en partenariat avec KilaloPress, cette formation avait pour ambition de renforcer les capacités des blogueurs et journalistes environnementaux dans une région particulièrement vulnérable aux atteintes à la biodiversité. Pollution des lacs, exploitation illégale des ressources naturelles, déforestation massive… Les défis sont nombreux et souvent transfrontaliers, notamment entre la RDC, le Rwanda, le Burundi et l’Ouganda.

Les participants ont été formés par une équipe pluridisciplinaire composée de spécialistes et de professeurs d’université. Au programme : droits environnementaux, techniques de reportage, enquêtes de terrain, plaidoyer stratégique et sensibilisation communautaire. L’approche mêlant théorie et pratique a permis une immersion complète dans les réalités du terrain.

Parmi les moments forts de cette formation, plusieurs interventions d’experts de haut niveau ont profondément marqué les participants. Maître Olivier Ndoole, avocat d’intérêt public et secrétaire exécutif de l’Alerte Congolaise pour l’Environnement et les Droits de l’Homme (ACEDH), a mis en lumière la nécessité de protéger la faune et la flore sauvage dans les paysages des Virunga et du Parc National de Kahuzi-Biega (PNKB), tout en soulignant le rôle central que doivent jouer les journalistes blogueurs dans le contentieux stratégique climatique. Il a appelé ces derniers à être des relais actifs de la justice environnementale.

Sous un angle complémentaire, Angenong’a Robert, expert national en sécurité des journalistes, a sensibilisé les participants sur l’usage des technologies journalistiques pour traquer les trafics illicites transfrontaliers et garantir leur propre sécurité. Un thème crucial pour des professionnels souvent exposés à des risques dans leurs enquêtes de terrain.

La voix de la société civile internationale s’est également exprimée à travers Vittoria Moretti, experte en plaidoyer et chargée de campagne au sein de Rainforest UK. Elle a éclairé les participants sur la place essentielle du journaliste blogueur dans le processus de plaidoyer lié aux crimes environnementaux, insistant sur leur capacité à mobiliser l’opinion publique et à influencer les politiques publiques au niveau local et international.

Le jour suivant, le docteur Cleo Mashini, docteur en droit de l’Université de Gand (Belgique), professeur et vice-doyen chargé de la recherche à la Faculté de droit de l’Université Pédagogique Nationale (UPN), directeur du Centre de Recherches Interdisciplinaires en Droit de l’Environnement (CRIDE), chercheur associé au Centre de Recherche en Sciences Humaines (CRESH), membre de la Commission mondiale du droit de l’environnement de l’UICN (CMDE), co-fondateur de JURISTRALE et avocat, est intervenu pour offrir aux blogueurs les bases juridiques nécessaires à la couverture des crimes environnementaux dans un contexte de montée en puissance des violations.

Enfin, l’expert Fla Gauthier Mujinga, juriste, écologue, chercheur en droit, spécialiste en droit de l’environnement et développement durable, membre de l’Observatoire sur l’Agenda 2030 des Nations Unies du C.E.I.M-UQÀM (Canada) et membre de l’OMIRAS, chercheur et membre de ResODD de l’universite de laval et conseiller juridique au LMS a clôturé la série avec une présentation percutante sur le braconnage dans les zones de conflit, mettant en évidence l’interconnexion entre insécurité, criminalité environnementale et trafic transfrontalier.

En renforçant leurs compétences, ces nouveaux ambassadeurs de l’environnement apportent une réponse concrète à un problème majeur : le manque de spécialisation dans le journalisme environnemental dans les zones transfrontalières. Cette lacune, souvent responsable d’une couverture insuffisante des enjeux écologiques, est désormais comblée.

« Nous avons appris à documenter, enquêter, dénoncer et surtout à sensibiliser les communautés à l’importance de préserver notre patrimoine naturel », confie Hélène Kipukila, blogueuse sur aupicinfo.com. Elle souligne aussi la nécessité d’un journalisme de plaidoyer, capable de faire pression sur les autorités pour l’adoption de politiques écologiques efficaces.

De son côté, Elie Cirhuza, journaliste au média agricole et environnemental Mkulima.net, voit dans cette formation une opportunité unique de donner plus de poids à ses productions audiovisuelles, qu’il veut orienter vers la lutte contre la criminalité environnementale. Il ambitionne de toucher les consciences des communautés riveraines du parc national et du lac Kivu, véritable « mère nourricière » aujourd’hui en danger.

Cette initiative se distingue aussi par sa portée transfrontalière. En mobilisant des journalistes du Sud-Kivu pour surveiller les atteintes écologiques dans les zones à cheval entre plusieurs pays, elle jette les bases d’une coopération au-delà des frontières nationales. Une nécessité, tant les problématiques écologiques dépassent les limites administratives : les pollutions du lac Tanganyika ou du Kivu, la déforestation du bassin du Congo ou les trafics d’espèces protégées exigent des réponses coordonnées.

Loin d’un simple atelier, cette formation s’est voulue un espace de transformation. Les journalistes formés deviennent aujourd’hui des acteurs clés de la défense environnementale, capables de former, d’informer et de dénoncer, mais aussi de mobiliser et d’agir.

Le chef d’antenne d’APEM, Eddy Mugaruka, n’a pas manqué de saluer l’engagement des participants lors de la cérémonie de clôture :
« Vous avez montré un sens de responsabilité admirable. Ce que vous avez appris, mettez-le au service de notre environnement menacé. La route est longue, mais ensemble, nous pouvons faire la différence. »

Si les participants ont exprimé leur fierté et leur engagement à devenir de véritables ambassadeurs de la cause écologique, ils ont aussi lancé un appel : celui d’un accompagnement technique, matériel et financier pour pérenniser les acquis de la formation. Ils souhaitent continuer leurs actions sur le terrain et produire des contenus de qualité, accessibles à toutes les couches de la population.

Cette formation s’inscrit dans un mouvement plus large, celui d’un journalisme engagé pour la planète. En armant les professionnels de la communication avec des outils adéquats, APEM et KilaloPress viennent renforcer une chaîne de solidarité écologique, essentielle pour la survie des écosystèmes transfrontaliers.

À travers leurs futurs reportages, enquêtes, vidéos, blogs et plaidoyers, ces journalistes contribueront à éveiller les consciences, à dénoncer les crimes contre la nature, et à proposer des solutions durables. Le Sud-Kivu dispose désormais d’une nouvelle génération de gardiens de l’environnement, prêts à écrire, filmer et porter la voix de la nature.

Un grand bravo à tous les organisateurs, formateurs, experts et participants qui ont rendu possible cette aventure humaine et écologique. L’histoire retiendra que c’est par la plume, la caméra et l’engagement que la nature a trouvé de nouveaux défenseurs.

Par Patrick Babwine

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