Dans un contexte troublant que traverse le Parc national de Kahuzi Biega, le Sud-Kivu franchit une étape décisive dans sa lutte contre sa déforestation avec l’investiture de sept nouveaux Officiers de Police Judiciaire. Une action symbolique, mais qui soulève des questions sur la réelle capacité de la province à endiguer un fléau aux multiples enjeux.
Le Sud-Kivu, une province au cœur des enjeux environnementaux en République Démocratique du Congo, vient d’introduire une nouvelle arme dans sa lutte contre la déforestation illégale. Ce mardi, sept nouveaux agents du Fonds Forestier National (FFN) ont prêté serment en tant qu’Officiers de Police Judiciaire (OPJ) à compétence restreinte, un acte symbolique fort, mais qui, dans le contexte de crise écologique, ne fait que souligner l’ampleur du défi.
Ces OPJ, désormais investis de pouvoirs d’enquête et de répression, auront pour mission de lutter contre les infractions liées à l’exploitation illégale des ressources forestières. Leur rôle consiste à traquer les pratiques non réglementées, à identifier les exploitants illégaux et à veiller au respect du Code forestier. Mais derrière cette initiative se cache un enjeu plus vaste : la sauvegarde des forêts du Sud-Kivu, qui subissent une pression incessante en raison de la déforestation, de l’exploitation minière et de l’agriculture de subsistance.
La déforestation dans le Sud-Kivu n’est pas qu’un problème local. Elle touche directement la biodiversité, la régulation du climat et la vie de millions de Congolais qui dépendent des forêts pour leur subsistance. Pourtant, malgré la mobilisation de quelques institutions comme le FFN, la situation reste critique.
Les récents chiffres sont alarmants : les forêts de la province continuent de se réduire à un rythme effrayant. La cause ? Une exploitation anarchique, souvent illégale, alimentée par des acteurs locaux mais aussi des réseaux plus larges, qui exploitent les ressources naturelles sans aucune considération pour leur durabilité. Des milliers d’hectares disparaissent chaque année, emportant avec eux une partie du patrimoine naturel du pays.
C’est dans ce contexte que le Sud-Kivu a décidé de renforcer sa politique de protection des forêts. L’investiture des nouveaux OPJ, en dépit de son caractère novateur, témoigne d’une volonté politique affirmée, mais soulève également des interrogations sur l’efficacité de cette démarche à long terme. En effet, l’un des défis majeurs reste la capacité des autorités locales à superviser et à sanctionner réellement ces pratiques illégales sur un territoire vaste et difficilement accessible.
Lors de la cérémonie de prestation de serment, Me Didier KABI, Ministre provincial de l’Environnement et de l’Économie verte, a souligné l’importance de cette initiative et a encouragé une collaboration renforcée entre les agents de terrain et les communautés locales. « La déforestation est un combat de tous », a-t-il insisté, appelant à une solidarité collective pour la sauvegarde de l’environnement. Mais derrière ces mots, la question qui se pose est : les moyens seront-ils à la hauteur des ambitions ?
Si la création de ces OPJ est un pas important, elle reste insuffisante pour résoudre une crise écologique qui touche à la fois la gouvernance locale, l’accès aux ressources naturelles et la gestion durable des forêts. Le FFN, en tant que principal bailleur de fonds, joue un rôle central dans cette dynamique, mais il doit faire face à des défis logistiques et financiers colossaux. Le renforcement de la surveillance des forêts et la mise en place de mécanismes de sanction efficaces nécessitent une révision profonde des priorités gouvernementales et un investissement massif dans la formation des agents.
La nomination de ces sept OPJ au Sud-Kivu est une étape significative dans la lutte contre la déforestation, mais elle ne doit pas masquer la réalité : sans une mobilisation véritablement collective, et sans une véritable volonté de changer les pratiques à tous les niveaux de la société, les forêts de la province continueront de disparaître, emportant avec elles un peu plus chaque jour l’espoir d’un avenir plus vert pour le pays. La véritable question reste donc : le Sud-Kivu saura-t-il transformer cette prise de conscience en actions concrètes et durables ? La réponse pourrait bien déterminer l’avenir de ses forêts, et celui de ses habitants.
Par kilalopress