Le gouvernement congolais a relancé en mai 2025 un appel d’offres controversé pour l’exploitation de 52 blocs pétroliers, contre 27 précédemment. Cette décision a immédiatement suscité de vives réactions, notamment de la part du mouvement citoyen Filimbi, particulièrement actif dans la province du Sud-Kivu.
Filimbi, par la voix de son coordinateur provincial Augustin Beya, a exprimé une ferme opposition à ce projet, qu’il qualifie de “menace écologique majeure”, en particulier pour le couloir vert Kivu-Kinshasa, une zone prioritaire pour la restauration environnementale et la conservation de la biodiversité. « La réouverture de ces 52 blocs met en péril des acquis environnementaux et compromet l’avenir des communautés vivant dans les zones ciblées », a-t-il déclaré lors d’une interview accordée à KilaloPress.
Du 15 au 28 juin 2025, Filimbi s’est joint à une série de manifestations nationales dénonçant les risques d’une exploitation pétrolière non régulée dans le bassin du Congo. Le 26 juin, plusieurs mouvements, dont Filimbi et la coalition “Le Congo n’est pas à Vendre” (CNPAV), ont présenté un mémorandum commun appelant le gouvernement à instaurer un moratoire sur tout nouveau projet pétrolier dans cette région sensible. Ces organisations insistent sur la nécessité de préserver non seulement les écosystèmes menacés, mais également les moyens de subsistance des populations locales.
Filimbi ne se limite pas à dénoncer. Le mouvement mène un travail de fond d’éducation populaire et de sensibilisation à l’impact de l’exploitation pétrolière sur la santé, le climat et les droits humains. Dans sa lutte au Sud-Kivu, il appelle à un changement de paradigme en faveur des énergies renouvelables, considérées comme une alternative durable face aux combustibles fossiles.
Le mouvement rappelle que l’exploitation du pétrole génère des polluants majeurs, dont le dioxyde de carbone (CO₂), le méthane (CH₄), les oxydes d’azote (NOx), le dioxyde de soufre (SO₂) et le monoxyde de carbone (CO). Ces gaz à effet de serre participent directement à l’amplification du changement climatique. À cela s’ajoutent les effets sur la santé humaine, notamment les troubles respiratoires, les perturbations endocriniennes causées par des substances comme les phtalates et le bisphénol, ainsi que les risques d’obésité, de diabète ou d’infertilité.
L’exploitation pétrolière a aussi des conséquences visibles et durables sur les sols, les forêts et les cours d’eau. Les rejets accidentels ou non maîtrisés de pétrole contaminent les terres agricoles, détruisent les habitats naturels et appauvrissent la biodiversité. Les écosystèmes fragiles comme les mangroves et les forêts humides du bassin du Congo sont particulièrement exposés à ces perturbations.
En octobre 2024, Filimbi, aux côtés du CNPAV, avait obtenu une première victoire : l’annulation de 27 blocs pétroliers grâce à une campagne de plaidoyer intensive. Aujourd’hui, face à la réintroduction de ces blocs et à l’extension à 52 concessions, le mouvement redouble d’efforts. Il se dit convaincu que seule une mobilisation citoyenne continue et une pression soutenue sur les autorités permettront d’empêcher un désastre écologique et social.
Filimbi réaffirme que le développement ne peut être construit sur la destruction des fondements écologiques du pays. Pour ce mouvement citoyen, l’exploitation des ressources naturelles ne peut être acceptée que si elle respecte les principes de transparence, d’équité sociale et de justice environnementale. « Nous ne sommes pas contre le développement économique, mais il doit être aligné avec nos engagements environnementaux et les droits des communautés. Sinon, ce sera un développement contre les Congolais, pas pour eux », conclut Augustin Beya. En misant sur les énergies propres et la participation citoyenne, Filimbi entend proposer une autre voie pour la RDC : celle d’un développement durable, souverain et respectueux de la vie.
Par Patrick Babwine