Le 16 janvier 2025, le Centre des recherches en Finances publiques et en Développement local (CREFDL) a lancé une mise en garde acerbe contre les récentes prévisions de croissance et les promesses financières du FMI envers la République Démocratique du Congo (RDC). Ce dernier, qui s’est vu attribuer un prêt de 3 milliards de dollars dans le cadre d’un nouveau partenariat, voit ses efforts de relance économique et environnementale sérieusement remis en question par les experts du CREFDL. La tension est palpable, et les interrogations sont nombreuses : est-ce vraiment de la croissance, ou un voile derrière lequel se cache l’impréparation du gouvernement et une gestion budgétaire plus que chaotique ?
Alors que le Fonds Monétaire International (FMI) vante une prévision de croissance du PIB de 6,0 % pour 2024, soutenue par la mise en place d’un plan de financement de 3 milliards de dollars, le CREFDL s’élève contre une analyse qu’il considère déconnectée de la réalité du terrain. Selon le FMI, l’inflation a diminué, passant de 23,8 % à 12,8 %, et des améliorations budgétaires sont en vue grâce à la réduction des déficits et la hausse des réserves internationales. Mais le CREFDL n’est pas dupe : “Les indicateurs de croissance évoqués sont en déphasage avec les réalités de terrain”, peut-on lire dans son communiqué. Un déphasage qu’il est difficile de nier quand on observe le fossé entre les chiffres officiels et la vie quotidienne des Congolais. Dans les rues de Kinshasa, les pénuries de carburant, l’électricité instable et la pauvreté rampante sont des témoignages évidents de l’inefficacité des politiques publiques. “Le FMI doit cesser de se faire complice d’un gouvernement qui, au lieu de gérer de manière rigoureuse, multiplie les dépenses incontrôlées”, insiste le CREFDL, pointant du doigt les engagements budgétaires mal maîtrisés et l’absence d’une gestion des finances publiques cohérente.
Mais au-delà des promesses de croissance, c’est bien l’avenir de la dette publique congolaise qui inquiète le CREFDL. Cette injection de 3 milliards de dollars est perçue non seulement comme une caution donnée à un gouvernement dont la discipline budgétaire laisse à désirer, mais aussi comme un piège à long terme pour le pays. Le CREFDL met en lumière la contradiction flagrante entre les prêts massifs octroyés par le FMI et les résultats tangibles pour la population : “Comment peut-on prétendre améliorer les conditions de vie des Congolais lorsqu’un pourcentage élevé de ces fonds est englouti dans des dépenses inefficaces ?” En effet, alors que le gouvernement se vante de ce soutien financier extérieur, la question de l’utilisation de l’argent public reste une énigme. “Il est impératif que le FMI exige des audits exhaustifs sur les circuits de recettes publiques, les dépenses, la rémunération des fonctionnaires et l’utilisation des fonds dédiés à des projets phares comme la lutte contre le COVID-19 et le Programme de Développement des 145 Territoires”, insiste le CREFDL.
Il est intéressant de noter que ce prêt de 3 milliards de dollars s’inscrit dans un contexte où la RDC peine encore à honorer ses engagements précédents. L’accord signé en 2024 entre le gouvernement congolais et le FMI est censé durer 20 ans, mais à quel prix ? Si le FMI semble applaudir des réformes qu’il juge nécessaires pour l’atténuation des impacts du changement climatique et pour la transition vers une économie plus verte, il est clair que les priorités du gouvernement sont ailleurs. La signature de nouveaux partenariats avec le FMI, en dépit de l’incapacité de rendre des comptes sur l’usage des précédents financements, fait naître des interrogations sur la rigueur de cette collaboration.
Le CREFDL dénonce un “FMI complaisant”, qui semble vouloir s’aligner sur une vision de croissance favorable aux engagements environnementaux mais totalement détachée des réels besoins des Congolais. “Ce soutien financier ne saura en aucun cas améliorer la vie des Congolais si les fondamentaux de la gestion économique ne sont pas réformés en profondeur. Les masses populaires continueront à souffrir tandis que les élites politiques et économiques continueront à bénéficier d’une manne d’argent facile”, prédit l’organisation. Au cœur de cette polémique se trouve une question centrale : la RDC est-elle prête à réformer son économie de manière durable, ou est-elle condamnée à dépendre des financements extérieurs sans en tirer de bénéfices réels pour sa population ? Si le FMI continue à fournir des prêts à un gouvernement dont l’indiscipline budgétaire est notoire, les promesses de croissance risquent de demeurer vaines et de ne servir que les intérêts d’une petite élite au pouvoir.
Le CREFDL appelle ainsi le FMI à prendre ses responsabilités, à ne pas se laisser aveugler par des chiffres apparemment positifs, et à exiger une gouvernance plus rigoureuse de la part du gouvernement congolais. Le temps des discours rassurants doit céder la place à des actions concrètes et une véritable transparence sur l’utilisation des fonds publics. Si le FMI persiste dans sa complaisance, il ne faudra pas s’étonner de voir le pays plonger davantage dans une spirale de dettes et de désillusion. Ce débat est loin d’être clos, et la RDC se trouve une fois de plus à un carrefour décisif. La véritable question reste : la RDC parviendra-t-elle à se libérer de l’étreinte des financements externes et à mettre en place une gouvernance économique qui profite réellement aux Congolais, ou continuera-t-elle à danser au rythme des promesses inaccessibles ? Le FMI, en tout cas, semble avoir fait son choix.
Par kilalopress