La 29e Conférence des Parties sur le changement climatique (COP29) bat son plein à Bakou, en Azerbaïdjan, et la République Démocratique du Congo (RDC) y fait entendre sa voix. Judith Suminwa Tuluka, Première Ministre de la RDC, a pris la parole hier pour défendre la position de son pays, se présentant comme un “pays-solution” dans la lutte contre le réchauffement climatique.
“Nous sommes le deuxième poumon climatique du monde”, a déclaré Mme Tuluka, faisant référence aux vastes forêts tropicales de la RDC. “Il est temps que notre contribution soit reconnue et récompensée de manière équitable.” Cette déclaration souligne la volonté de la RDC d’obtenir une compensation financière pour le rôle crucial que jouent ses forêts dans l’absorption du CO2.
La position de la RDC met en lumière un débat plus large sur la justice climatique. Alors que les pays industrialisés sont les principaux responsables des émissions de gaz à effet de serre, ce sont souvent les nations en développement, riches en ressources naturelles, qui supportent le poids de la préservation de l’environnement.
La Première Ministre a également souligné l’importance de préparer la transition énergétique pour le développement du pays. “Nous devons trouver un équilibre entre la préservation de nos ressources naturelles et nos besoins de développement économique”, a-t-elle ajouté. L’Azerbaïdjan, en tant que pays hôte de la COP29, se trouve dans une position délicate. Le président azerbaïdjanais, Ilham Aliyev, a défendu la position de son pays lors de son discours d’ouverture, qualifiant le pétrole et le gaz de “cadeau de Dieu”. Cette déclaration a suscité des critiques de la part des militants écologistes et de certains participants à la conférence.
Malgré son rôle d’hôte, l’Azerbaïdjan prévoit d’augmenter sa production de pétrole et de gaz dans la prochaine décennie. Le pays, dont l’économie dépend fortement des hydrocarbures (60% du budget de l’État en 2021), semble réticent à s’engager pleinement dans une transition énergétique rapide. Cette position ambiguë de l’Azerbaïdjan soulève des questions sur la sincérité des engagements pris lors de ces conférences climatiques et met en lumière les défis auxquels font face les pays producteurs de combustibles fossiles dans la lutte contre le changement climatique.
Dans un coup d’éclat dès le premier jour de la COP29, les pays participants ont donné leur feu vert au lancement d’un marché mondial du carbone soutenu par l’ONU. Ce marché, prévu par l’article 6.4 de l’Accord de Paris, vise à financer des projets de réduction des émissions de gaz à effet de serre. Les États-Unis, en particulier, se sont montrés très engagés sur ce sujet, notamment pour leur secteur de l’aviation. Les critères adoptés à Bakou régissent la méthodologie pour calculer le nombre de crédits qu’un projet donné peut générer, et ce qui se passe si le carbone stocké est perdu. Ces normes concernent principalement les pays riches et pollueurs qui cherchent à compenser leurs émissions en achetant des crédits à des nations qui ont réduit les gaz à effet de serre au-delà de ce qu’elles avaient promis.
Cependant, cette décision rapide a suscité des critiques de la part de certaines ONG, comme Oil Change International, qui dénonce une décision prise “sans débat ou examen du public”. La position des pays africains, dont la RDC, est particulièrement intéressante dans ce contexte. L’Afrique, avec ses 54 pays, parle d’une seule voix dans l’arène climatique, ce qui lui permet de pousser des sujets comme celui de l’adaptation. Cependant, face aux pays industrialisés ou aux grands émergents, sa capacité d’influence demeure encore limitée.
Cette COP29 se déroule dans un contexte particulièrement tendu. L’année 2024 s’annonce comme potentiellement la plus chaude jamais mesurée, avec un nouveau record d’émissions de CO2. Pendant ce temps, certains pays, comme les États-Unis, annoncent des plans ambitieux, tels que le triplement de leur production nucléaire d’ici 2050. La position de la RDC reflète une tendance croissante parmi les pays en développement à demander une plus grande reconnaissance et un soutien financier pour leur rôle dans la lutte contre le changement climatique. Reste à voir comment ces demandes seront accueillies par la communauté internationale et si elles se traduiront par des engagements concrets à l’issue de cette COP29.
Alors que les négociations se poursuivent, l’engagement du gouvernement congolais et cel de la société civile congolaise dans le positionnement de la RDC demeure déterminant. La lutte contre le changement climatique est une responsabilité mondiale, et chaque contribution, qu’elle provienne des forêts du bassin du Congo ou des laboratoires de recherche en énergie propre, mérite d’être valorisée.
Par Franck zongwe lukama