Une mission controversée en Ituri soulève des inquiétudes dans cette province du nord-est de la République Démocratique du Congo (RDC), la réserve de faune à Okapis (RFO) se trouve à un tournant critique. Créée en 1991 pour protéger une biodiversité unique, cette réserve, classée au patrimoine mondial de l’UNESCO, est aujourd’hui menacée par des activités minières illégales.
Le 23 juillet dernier, une mission provinciale a été lancée pour vérifier les limites de la réserve. Cependant, cette initiative suscite des inquiétudes parmi les défenseurs de l’environnement qui soupçonnent une manœuvre visant à légaliser l’exploitation minière dans cette zone protégée.
Avec une superficie de près de 14 000 kilomètres carrés, la RFO abrite l’Okapi, un animal endémique souvent surnommé la « girafe forestière ». La réserve est également le refuge de 376 espèces d’oiseaux rares et de plusieurs autres animaux protégés. Malheureusement, malgré ce statut prestigieux, la réserve est souvent la cible d’exploitations minières illégales, qui mettent en danger ses écosystèmes fragiles.
Le lieutenant-colonel Jules Ngogo, porte-parole du gouverneur militaire, a justifié la mission de vérification des limites de la réserve en expliquant que de nombreux exploitants miniers opèrent sans savoir s’ils se trouvent à l’intérieur ou à l’extérieur des frontières de la RFO. Il insiste sur le fait que cette mission vise à établir des limites claires et à réguler les activités économiques dans la région.Cependant, les associations de défense de l’environnement ne partagent pas ce point de vue. Elles accusent la mission provinciale de chercher à ouvrir la voie à une légalisation de l’exploitation minière au sein de la réserve. Selon ces groupes anonymes, la mission a été lancée peu après le rejet par l’administration de la RFO d’une demande d’exploitation minière dans le village de Bapela, situé en plein cœur de la réserve. De plus, des sources contactées par Kilalopress confirment que l’exploitation minière illégale est une réalité dans la région de Badengaido depuis 2017, amplifiant ainsi la gravité de la situation.
Face à ces accusations, le lieutenant-colonel Ngogo appelle à la patience. « Il est trop tôt pour juger cette mission », affirme-t-il. « Nous devrons attendre ses conclusions pour savoir exactement où se trouvent les exploitants miniers et les délimitations à établir. La RFO est une grande institution, et nous devons nous appuyer sur les archives pour une délimitation précise ».
Néanmoins, les défenseurs de l’environnement redoutent que cette vérification ne soit qu’une première étape vers une légalisation qui mettrait en péril l’intégrité écologique de la réserve.
L’exploitation minière en Ituri n’est pas seulement une menace pour la biodiversité. Elle a également des répercussions significatives sur les communautés locales, qui dépendent des ressources naturelles de la région pour leur subsistance. La déforestation et la pollution associées aux activités minières pourraient altérer les écosystèmes et entraîner la perte de terres agricoles et de sources d’eau pour les villageois.
De plus, la légalisation de l’exploitation minière dans la RFO pourrait encourager des activités illégales dans d’autres zones protégées du pays, aggravant ainsi le problème à l’échelle nationale de ce pays.
La situation illustre un dilemme complexe entre développement économique et conservation de l’environnement. Alors que le gouvernement provincial affirme vouloir clarifier les limites de la réserve, les accusations de tentative de légalisation de l’exploitation minière soulèvent des questions cruciales sur la véritable intention derrière cette mission. L’avenir de la réserve de faune à Okapis pourrait bien dépendre de l’équilibre entre la protection de son écosystème unique et les pressions économiques croissantes.
Cette affaire rappelle l’importance de maintenir une vigilance constante sur les politiques environnementales, notamment dans les zones protégées. Le dilemme de l’exploitation des ressources naturelles face à la conservation est loin d’être résolu, et la communauté internationale doit rester attentive aux développements futurs en Ituri. Le sort de la RFO pourrait bien servir de test pour la capacité des autorités congolaises à gérer le développement durable tout en protégeant un patrimoine mondial inestimable.
La Rédaction