Dans un tableau poignant de la lutte pour les droits fonciers, plus de vingt ménages se sont retrouvés sans abri, contraints de passer des nuits froides et désespérées devant l’enceinte austère de l’Assemblée provinciale du Sud-Ubangi, à Gemena.
Leur crime ? Avoir été déguerpis de leurs foyers par une décision judiciaire controversée, au cœur d’un litige opposant la 17ᵉ Communauté évangélique du Christ de l’Ubangi (CECU) à des citoyens démunis.
Le récit de leur calvaire est aussi amer que déchirant. Issus de la commune de Labo, dans la localité de Libenge Moke, ces résidents, dont certains sont des familles avec de jeunes enfants, ont été dépouillés de leurs demeures suite à une exécution de jugement en faveur de la CECU, qui revendique la propriété des terres qu’ils occupaient légalement. Achetant les parcelles à la cheffe Marie-Sophie Nzenge, encore en vie, ces déguerpis ont cru trouver en ces lieux un refuge, un foyer pour élever leurs familles. Mais la justice, marquée par une série d’allées et venues procédurales, leur a retiré ce droit élémentaire.
Face à cette injustice criante, ces hommes, femmes et enfants se sont mobilisés, bravant l’obscurité et les éléments, pour plaider leur cause devant les autorités provinciales. Leur appel désespéré résonne dans les murs de l’Assemblée, un cri silencieux pour une réparation, une reconnaissance de leurs droits bafoués.
Dans cette atmosphère de désespoir, un élan de solidarité a néanmoins émergé, incarné par le député provincial Junior Ambeke Likela, qui a offert un soutien en vivres et non vivres à ces laissés pour compte. Cependant, cette aide ponctuelle ne saurait effacer le malaise profondément enraciné dans cette communauté, où le sentiment d’injustice et d’abandon persiste.
Du côté de la CECU, le silence règne. Bien que la légalité de leur revendication puisse être sujette à débat, le désarroi des déguerpis reste palpable. Leurs voix, portées par la nuit, appellent à une révision de ce dossier complexe, où la justice semble vaciller entre les intérêts des puissants et les droits des plus vulnérables.
Pendant ce temps, les autorités provinciales, tant politiques qu’administratives, sont interpellées. Leur inaction, ou pire, leur indifférence face à cette tragédie humaine, est un affront à la dignité et à la justice sociale. Leurs responsabilités ne sauraient être éludées dans cette affaire, qui écorne l’image d’une société où la protection des droits fondamentaux reste une promesse souvent trahie.
Alors que ces ménages déguerpis entament leur deuxième nuit sous les étoiles, l’urgence d’une action décisive se fait sentir. Leur sort, et celui de tant d’autres oubliés par les rouages de la justice, dépend de la volonté politique de faire primer la justice et l’humanité sur les intérêts particuliers et les jeux de pouvoir. La nuit est sombre, mais l’aube de la justice peut encore se lever pour ces exclus de la société.
La rédaction