Le 24 mars dernier, une rencontre cruciale a eu lieu au sein du Parc National des Virunga (PNVi), précisément à la station de Mutsora. L’objectif était de discuter de la situation complexe autour de Mayangose, une zone qui a longtemps été marquée par l’occupation illégale de terres. Une délégation importante, composée de représentants des agriculteurs de Mayangose et de leaders locaux de Beni, a pris part à ces échanges avec les autorités du PNVi.
Conduite par M. Nyonyi Bwanakawa, ancien maire de Beni, accompagnée de Mwami Achou, chef du village de Bapakombe, et de l’honorable Elie Kambere, élu de Beni, cette délégation est venue exprimer son désir de voir la situation stabilisée dans cette zone stratégique, au cœur du Parc des Virunga. Ce souhait fait suite à une opération menée la semaine précédente par les écogardes du parc, qui a conduit à la destruction de champs installés illégalement dans cette zone protégée ainsi qu’à l’arrestation de plusieurs agriculteurs.
Loin de recourir à la violence, la délégation a adopté une démarche pacifique, en plaidant pour une concertation entre toutes les parties prenantes. Leur objectif : engager les autorités compétentes pour trouver une solution durable face à l’occupation illégale du parc, qui menace la stabilité environnementale et la quiétude sociale dans la région. M. Rodrigue Mugaruka, Directeur et Chef de site adjoint du PNVi, a salué l’approche constructive de la délégation et leur volonté de dialogue. Toutefois, il a rappelé avec fermeté que la stabilité dans la région dépend avant tout du respect strict des lois encadrant les limites du parc. Il a précisé que les autorités du PNVi, en collaboration avec l’ICCN, sont déterminées à faire respecter les frontières légales du parc afin de préserver la biodiversité.
Les enjeux liés à l’occupation illégale des terres de Mayangose sont d’autant plus complexes qu’ils s’inscrivent dans un contexte historique et géopolitique difficile. Cette région, qui se trouve entre la ville de Beni, les rivières Semuliki et Ajuma, ainsi que la RN4 reliant Beni à Kasindi, a été progressivement envahie à la suite des différentes rébellions qui ont secoué l’est de la République Démocratique du Congo (RDC). Méthode Uhoze, Directeur des Relations Extérieures du PNVi, a pris la parole pour clarifier certains aspects juridiques relatifs aux limites du parc. Selon lui, ces limites n’ont jamais été modifiées depuis 1950. Seule la commission de 1948 avait le mandat d’examiner et de réviser ces limites, ce qui n’a pas été le cas lors des missions ultérieures, y compris celle de 2013 concernant Mayangose. Il a insisté sur le fait que l’ensemble des parties prenantes doit se référer aux frontières établies, corroborées par le rapport des experts de 2010, afin d’éviter toute ambiguïté.
La situation est d’autant plus compliquée qu’elle implique des enjeux politiques et économiques. La fertilité des terres de Mayangose est un argument majeur pour les agriculteurs, mais elle se heurte aux impératifs de conservation du Parc des Virunga, qui est l’un des patrimoines naturels les plus précieux au monde. En parallèle, la restauration de l’autorité de l’ICCN sur cette zone est un défi majeur, non seulement pour la conservation de la biodiversité, mais aussi pour la stabilité sociale et économique de la région. Les échanges entre les représentants des agriculteurs et ceux du PNVi ont été marqués par une volonté commune de collaborer pour préserver la paix sociale tout en protégeant les ressources naturelles du parc. Cependant, la conciliation entre les besoins agricoles locaux et les impératifs de conservation demeure un défi majeur.
À la fin de cette rencontre, il a été convenu d’organiser une nouvelle réunion pour approfondir les discussions et proposer des solutions concrètes et durables. Chaque partie aura la possibilité de présenter des propositions visant à garantir une gestion équilibrée des ressources, tout en respectant les limites légales du parc. Ce dialogue, empreint de respect mutuel, semble être un pas vers la construction d’une solution qui pourrait permettre de résoudre cette problématique complexe. Cette rencontre au Parc des Virunga marque une étape importante dans la recherche d’un compromis entre les impératifs environnementaux et les réalités socio-économiques locales. Mais la route vers une solution durable reste encore semée d’embûches.
Par kilalopress