Lors de la 11 eme conférence des gouverneurs à Kalémie, les chefs des exécutifs provinciaux de la République Démocratique du Congo ont fait entendre une voix commune, plaçant la question de l’environnement et de la gouvernance au cœur de leurs préoccupations. En demandant la rétrocession des frais de reboisement collectés par le Fonds Forestier National (FFN), ils soulignent une problématique à la fois cruciale et souvent ignorée : l’absence de retombées locales des fonds destinés à la protection des ressources naturelles. Cette requête, bien qu’édifiante dans son appel à la justice environnementale et sociale, soulève également d’importantes questions sur l’efficacité et la transparence de l’actuel système de gestion des ressources forestières.
La demande des gouverneurs s’inscrit dans une logique de gouvernance participative, où les décisions relatives aux ressources naturelles devraient être prises au plus près des réalités locales. En théorie, cette approche vise à renforcer l’autonomie des provinces tout en leur permettant de mieux répondre aux défis environnementaux spécifiques à leurs territoires. Pourtant, le Fonds Forestier National, chargé de collecter et de gérer les fonds pour la reforestation, semble fonctionner selon un modèle centralisé qui prive les gouvernements provinciaux des ressources nécessaires pour entreprendre des actions concrètes en matière de protection de l’environnement.
Les gouverneurs estiment à juste titre que les frais collectés pour la reforestation ne doivent pas simplement alimenter une caisse centralisée et opaque, mais être redistribués de manière à encourager des initiatives locales de préservation de la biodiversité. La rétrocession de ces fonds offrirait aux provinces la possibilité de gérer directement les projets de reboisement, tout en impliquant les communautés locales dans des actions de préservation qui, à long terme, peuvent améliorer l’environnement et les conditions de vie des populations.
Malheureusement, la gestion actuelle du FFN laisse à désirer. Si le fonds est censé être un instrument central pour la préservation de la forêt congolaise, il peine à répondre aux attentes des acteurs locaux. Au-delà de la question de la rétrocession des frais de reboisement, c’est tout le système de gestion du FFN qui semble souffrir d’une opacité inquiétante. Où vont réellement les fonds collectés ? Quel est le suivi des projets de reforestation ? Pourquoi si peu d’initiatives concrètes sont visibles dans les communautés locales ? Ces questions demeurent sans réponse, alimentant le scepticisme général quant à la gestion des ressources forestières en RDC. En effet, l’accumulation de fonds au sein du FFN ne garantit ni une protection efficace des forêts, ni une redistribution juste des bénéfices. La structure actuelle privilégie une approche technocratique qui néglige les réalités du terrain, là où les gouvernements provinciaux et les communautés locales sont les mieux placés pour comprendre les enjeux spécifiques liés à la gestion des écosystèmes.
La gestion des forêts congolaises, qui abritent près de 60 % des forêts tropicales africaines, est un enjeu mondial. Cependant, la RDC, en tant que pays souverain, a la responsabilité de veiller à ce que ses ressources naturelles soient protégées de manière durable. Cette responsabilité ne doit pas reposer uniquement sur le gouvernement central ou sur des institutions lointaines comme le FFN, mais doit être partagée avec les provinces et les communautés locales. Dans cette optique, les gouverneurs ont proposé la création de comités de pilotage provinciaux chargés de superviser l’exécution du programme de développement local et des initiatives de reboisement. Une telle démarche permettrait non seulement d’assurer un meilleur suivi des projets environnementaux, mais aussi d’encourager la participation des acteurs locaux, qui connaissent mieux que quiconque les particularités de leurs territoires.
Par kilalopress
