RDC : Le Gouvernement face à la réglementation européenne « zéro déforestation » et ses impacts sur l’exportation de cacao et café

Kinshasa, 31 décembre 2024 – La RDC se prépare à répondre aux inquiétudes croissantes des opérateurs économiques locaux, particulièrement dans les secteurs du cacao et du café, face à la réglementation européenne “zéro déforestation”. Ce règlement, qui entre en vigueur progressivement, impose des conditions strictes aux importations de produits agricoles provenant de zones de déforestation, un défi majeur pour un pays comme la République Démocratique du Congo, riche en biodiversité mais aussi touché par des problématiques environnementales complexes.

L’Union européenne a annoncé, dans un premier temps, que son règlement interdisant l’importation de produits liés à la déforestation entrerait en vigueur dès janvier 2025. Cependant, face aux préoccupations soulevées, le gouvernement congolais a obtenu un report de l’application de cette législation au 30 décembre 2025. Cette décision a permis de donner un peu de répit aux acteurs économiques, tout en laissant un an supplémentaire pour comprendre les implications concrètes de cette mesure. La Fédération des entreprises du Congo (FEC), notamment dans la région du Nord-Kivu, a exprimé de vives inquiétudes concernant l’impact de cette législation sur l’exportation de produits agricoles phares, tels que le cacao et le café. En décembre 2023 et 2024, des lettres de retrait de certifications “Fairtrade” et “Bio” ont été adressées aux producteurs congolais, ce qui pourrait freiner l’accès de ces produits aux marchés européens. Selon la FEC, cette exclusion met en péril les efforts de redressement du secteur, soutenus par des partenaires internationaux comme l’Union Européenne, USAID, le FIDA et la Banque mondiale.

Les certificats “Fairtrade” et “Bio” sont essentiels pour que le cacao et le café congolais puissent accéder à des niches de marché premium en Europe. Toutefois, ces certifications sont désormais remises en cause en raison de l’insécurité persistante dans les zones de production, notamment au Nord-Kivu, où des conflits armés compliquent les efforts de régulation et de traçabilité. Les autorités congolaises, et en particulier le ministère du Commerce extérieur, ont été alertées de cette situation, avec des implications potentielles très graves sur l’économie du pays. En effet, l’absence de certifications pourrait empêcher ces produits d’être commercialisés sous les labels “biologiques” ou “équitable”, deux critères fortement recherchés par les consommateurs européens. Cette évolution pourrait entraîner une perte importante de parts de marché, en particulier dans un secteur où la RDC cherche encore à se stabiliser et à regagner la confiance des consommateurs internationaux.

Au-delà des questions environnementales, les pertes économiques liées à la déforestation et à l’inefficacité de la gestion des exportations de cacao et de café sont préoccupantes. Selon Mike Ntambwe, directeur général de l’Agence Nationale de Promotion des Exportations (ANAPEX), la RDC perd chaque semaine plus de 400 tonnes de cacao à cause de pratiques frauduleuses. Ces pertes s’élèvent à près de 60 millions de dollars américains chaque année. Les producteurs congolais se trouvent également confrontés à une concurrence accrue, notamment avec l’Ouganda, où les exportations de cacao ne sont pas soumises aux mêmes taxes, ce qui rend leurs prix beaucoup plus compétitifs. En RDC, les taxes multiples et les coûts logistiques élevés compliquent encore davantage la situation, réduisant la rentabilité du secteur. Cependant, malgré ces défis, des signes positifs émergent. En 2023, les exportations de café congolais ont connu une nette augmentation, atteignant 12 422 tonnes contre 10 729 tonnes en 2022, selon les chiffres de la Banque Centrale du Congo (BCC). Ce dynamisme démontre qu’il existe un potentiel de croissance dans le secteur agricole, à condition que des mesures efficaces soient mises en place pour garantir la traçabilité des produits et répondre aux nouvelles exigences européennes.

Face à ces préoccupations, le gouvernement congolais s’est engagé à clarifier la situation avec les opérateurs économiques. Un point de presse, organisé par les ministères de l’Agriculture, de l’Environnement et du Commerce extérieur, aura lieu ce lundi pour fournir des éclaircissements sur l’impact réel du règlement européen et les démarches à suivre pour se conformer aux nouvelles normes. Pour les autorités congolaises, il s’agit de trouver un équilibre entre la préservation des forêts et le soutien à l’industrie agricole. La RDC, qui abrite une part significative du bassin du Congo, est appelée à jouer un rôle de premier plan dans la lutte contre la déforestation, un défi qui implique à la fois des enjeux environnementaux, économiques et sociaux. Le secteur du cacao et du café reste l’un des principaux moteurs de l’économie congolaise, avec des perspectives de croissance à moyen et long terme, à condition de réussir à s’adapter aux nouvelles régulations mondiales. La question qui se pose maintenant est de savoir si le pays pourra relever ce défi et trouver des solutions pour maintenir ses produits sur les marchés internationaux tout en respectant les critères environnementaux de plus en plus stricts.

Par kilalopress

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