Les dernières données sur l’insécurité alimentaire chronique en RDC révèlent qu’environ 40,8 millions de personnes sont confrontées à des niveaux modérés à sévères. Une réponse concertée et urgente est indispensable pour surmonter cette crise persistante.
A la demande des autorités nationales et de ses partenaires de développement, le Groupe de Travail Technique IPC de la République Démocratique du Congo (GTT-IPC RDC) a organisé une analyse de l’insécurité alimentaire chronique, en vue d’analyser et documenter les causes profondes, et de formuler des recommandations destinées aux décideurs en vue de s’attaquer aux facteurs structurels de l’insécurité alimentaire et d’endiguer la pauvreté persistante. Vaincre le fléau de l’insécurité alimentaire chronique en République Démocratique du Congo requiert la mobilisation de tous les vecteurs stratégiques de la société et de l’économie. Ceci nécessite un engagement sans faille au plus haut niveau de prise de décision.
Ce rapport arrive au moment où le gouvernement de la République Démocratique du Congo est en plein processus d’actualisation de son plan national stratégique de développement (PNSD) pour le prochain quinquennat. Les résultats de ce rapport fournissent des éléments analytiques et contextuels qui alimenteront sûrement le PNSD, ainsi que le programme de développement de 145 territoires porté par le chef de l’État et son gouvernement.
Après un premier cycle organisé en 2016, il s’est tenu à Kinshasa un nouveau cycle d’analyse intégrée de l’insécurité alimentaire chronique (IAC) en République Démocratique du Congo (RDC) en novembre 2023. Globalement, la situation de l’insécurité alimentaire chronique est préoccupante sur l’ensemble du territoire national avec 40% de la population classée au niveau modéré (Niveau 3) et sévère (Niveau 4). Des niveaux élevés de l’insécurité alimentaire chronique persistent malgré les potentialités agropastorales, halieutiques, minières, forestières, hydro-électrique entre autres dont regorgent le pays et les efforts mis en place par le gouvernement et ses partenaires dans la lutte contre l’insécurité alimentaire et la malnutrition.

Au nombre des facteurs qui favorisent la chronicité de l’insécurité alimentaire des ménages en RDC, il convient d’énoncer les conflits et violences armés à la base de nombreux déplacements de populations (Est du pays); les épidémies humaines, les épizooties, les attaques de culture et de plantes en plus des catastrophes naturelles (inondations, glissements de terrains, etc.); le faible niveau d’accès aux services sociaux de base (routes en état défectueux, faible accès à l’eau de boisson, dysfonctionnement des services sanitaires); le faible niveau de production agricole (bilan céréalier déficitaire) et la difficulté d’accès aux intrants de qualité (dégénérescence de semences, pas de crédit agricole etc.); la dépréciation de la monnaie nationale face à la devise américaine (hausse généralisée de prix) suivi de l’effondrement du pouvoir d’achat des ménages dans un contexte de pauvreté généralisée.
La pandémie de la Covid-19 et la guerre Russo-Ukrainienne ont fortement perturbé les disponibilités alimentaires, le prix du carburant à la pompe et exacerbé la dépréciation de la monnaie nationale (le Franc Congolais) face à la devise américaine (Dollar). A l’Est du pays, l’activisme de groupes armés nationaux et étrangers contribue largement aux mouvements de populations qui abandonnent leurs activités de moyens d’existence. Certaines zones du pays faisant face à une insécurité alimentaire aiguë élevée, sont de tout de même affectées par une insécurité alimentaire chronique sévère ou modérée en raison des facteurs structurelles complexes.
Au cours de ce cycle, une approche hybride a été adoptée, notamment la classification des territoires et des provinces en fonction de la disponibilité des preuves ou données représentatives.
Vaincre le fléau de l’insécurité alimentaire chronique en République Démocratique du Congo requiert la mobilisation de tous les vecteurs stratégiques de la société et de l’économie, incluant un leadership politique fort au niveau supérieur de l’état, et un engagement soutenu du gouvernement. De plus, il est crucial de prendre en compte les recommandations sectorielles suivantes, amplement développées dans le corps du présent rapport :
- Renforcer les mécanismes nationaux et régionaux de réconciliation et de pacification des zones affectées par les conflits à travers un dialogue permanent entre les communautés, la répartition équitable des ressources à travers des programmes sociaux et l’encadrement des jeunes pour un meilleur accès à l’emploi.
- Intensifier la transparence dans l’utilisation des ressources publiques, le renforcement de l’état de droit, du système judiciaire et l’application de la loi, y compris lutter contre toutes formes d’impunités.
- Accroître les ressources allouées aux infrastructures socioéconomiques en vue d’améliorer la fonctionnalité des marchés et maintenir les réseaux de transport aérien, terrestre, maritime et fluvial pour faciliter les échanges économiques et l’intégration nationale et régionale, tout en garantissant l’accès à l’énergie et à l’eau potable.
- Renforcer les programmes gouvernementaux de relèvement du secteur agricole afin d’améliorer la production et la productivité des aliments de base (selon les zones agroécologiques du pays) et garantir aux ménages une consommation d’aliments riches en nutriments.
- Mettre en place des mesures favorables aux investissements privés dans le secteur agriculture, pêche et élevage.
- Encourager le regroupement et la structuration des opérateurs économiques locaux pour faciliter l’accès aux crédits à travers des initiatives sociales et de solidarité servant de garantie auprès des institutions de microfinances et des banques.
- Renforcer la mise en place des filets de protection sociale formels, notamment des programmes sociaux de transferts monétaires dans les zones où sévit une pauvreté monétaire persistance et chronique.
L’insécurité alimentaire chronique en RDC ne peut être résolue que par une approche holistique et une mobilisation à grande échelle. Les recommandations du rapport soulignent l’urgence d’une action coordonnée et soutenue, impliquant non seulement le gouvernement et ses partenaires nationaux et internationaux, mais aussi la société civile et le secteur privé. Il est impératif que les autorités de Kinshasa répondent promptement à ces recommandations pour garantir un avenir plus sûr et plus prospère pour tous les Congolais.
Par la rédaction