Kinshasa, 11 juin 2025 – C’est une petite révolution intellectuelle et stratégique qui se déroule discrètement à Kinshasa. Depuis le 10 juin, la capitale congolaise accueille la 2ᵉ édition du Forum du bassin du Congo sur les ressources en eau, un événement d’envergure internationale qui réunit près de 30 pays autour d’un même objectif : mieux comprendre, protéger et valoriser l’eau comme moteur du développement durable dans le bassin du Congo.
Porté par l’École régionale de l’eau de l’Université de Kinshasa et le Centre de recherche en ressources en eau du bassin du Congo (CREEBaC), ce forum illustre le rôle croissant de la République démocratique du Congo (RDC) en tant que leader régional de la recherche hydrologique.
« Libérer le potentiel des services des ressources en eau en vue d’atteindre le développement durable » : derrière ce thème, c’est toute une vision systémique qui émerge. Loin de n’être qu’une simple ressource, l’eau devient ici un vecteur transversal : énergie, agriculture, transport, biodiversité, économie bleue, sécurité alimentaire… tout converge vers elle.
Le professeur Raphaël Tshimanga, figure scientifique de référence et directeur de l’École régionale de l’eau, souligne cette interconnexion : « Grâce à l’eau, nous pouvons produire une énergie propre, cultiver toute l’année, préserver les tourbières et relier les territoires enclavés. C’est une richesse sous-exploitée. » Cette déclaration résonne fortement à l’heure où le bassin du Congo, deuxième réservoir forestier mondial après l’Amazonie, se positionne aussi comme un puits de carbone essentiel pour la planète. Or, cette stabilité climatique dépend directement de la qualité et de la quantité d’eau qui circule dans ses écosystèmes. Ce forum marque une étape cruciale dans la construction d’une vision scientifique panafricaine, pilotée depuis la RDC.
Le ministre de la Recherche scientifique, Gilbert Kabanda, a lancé un appel fort à l’unité entre chercheurs, gestionnaires et décideurs pour faire face à une série de menaces : changement climatique, déforestation, pollution minière et domestique, et manque criant d’infrastructures scientifiques.
Les six groupes de travail du forum couvrent les défis les plus pressants, allant de la transition énergétique à la gouvernance inclusive en passant par la sécurité alimentaire et la gestion des zones humides. Ce choix thématique reflète une approche holistique, indispensable pour dépasser les logiques sectorielles qui freinent encore l’action concertée dans la région.
Ce forum n’est pas seulement un espace d’échange ; il est aussi la preuve concrète du succès d’une initiative académique et scientifique congolaise. En créant l’École régionale de l’eau et le CREEBaC, la RDC a su se doter d’outils d’excellence pour piloter ses politiques hydriques sur des bases scientifiques solides. Ce modèle fait désormais école : la RDC devient ainsi le premier pays du bassin à se doter d’un tel dispositif régional intégré, et le deuxième à l’échelle continentale, après l’Afrique du Sud. Une avancée stratégique pour tout le continent, car la maîtrise des ressources en eau est désormais indissociable de la souveraineté environnementale.
Face aux bouleversements climatiques et à la pression croissante sur les ressources, le forum de Kinshasa envoie un message fort : l’Afrique centrale n’est pas seulement victime du changement climatique, elle est aussi force de proposition, de recherche et d’innovation. Dans une région souvent stigmatisée pour son instabilité, voir des scientifiques, étudiants, bailleurs et décideurs coopérer pour bâtir une stratégie régionale sur l’eau est un signal d’espoir et de résilience. Le bassin du Congo a commencé à parler d’une seule voix. Et cette voix, désormais, porte.
Par Deo MALELA
Je suis vraiment Ravi de suivre votre exposé en ligne