La nuit du 21 février 2025 restera gravée dans la mémoire des habitants de Camp Djigba et Tambiza. Sous le couvert des ténèbres, des hommes armés de machettes et de torches enflammées ont semé la terreur dans ces deux sites miniers situés à 20 kilomètres du centre négoce MOKU, en chefferie Mari-Minza (territoire de Watsa, province du Haut-Uele). En quelques heures, près de 29,5 millions de francs congolais et 37 grammes d’or environont été dérobés, laissant derrière eux huit blessés et une communauté sous le choc.
Cet énième incident, survenu une semaine après une attaque similaire à Giro, soulève des questions brûlantes : Pourquoi ces zones minières restent-elles des proies faciles ? Et jusqu’où l’insécurité menacera-t-elle l’économie locale, déjà fragile aux yeux des autoritées?
Les sites miniers de l’est de la République Démocratique du Congo (RDC) sont souvent décrits comme des « eldorados vulnérables ». Selon l’Initiative pour la Transparence dans les Industries Extractives (ITIE), près de 60 % des conflits armés dans la région sont liés à l’exploitation illégale des ressources. L’attaque de Camp Djigba et Tambiza n’est malheureusement pas un cas isolé. « Ces bandits agissent en toute impunité parce qu’ils savent que les forces de sécurité sont sous-équipées et que les communautés sont isolées », explique un agent de sécurité sous couvert d’anonymat, confirmant l’événement à notre radio ce samedi 22 février.
Pour les habitants, ces raids récurrents ne volent pas seulement des biens : ils sapent les fondements de leur survie. « L’or et l’argent volés représentent des mois de travail artisanal. Sans cela, comment nourrir nos familles ? », s’indigne un mineur rencontré près de Ngangazo, où les victimes sont soignées. L’économiste Dr Jean-Claude Mumbere alerte : « Chaque attaque de ce type éloigne un peu plus les investisseurs légitimes, plongeant la région dans un cycle de pauvreté et de violence. »

Selon des témoignages recueillis sur place, les assaillants ont frappé vers 2 heures du matin, profitant de l’absence de patrouilles policières nocturnes. Armés de machettes et de torches, ils ont forcé les portes de six maisons de commerce, neutralisant toute résistance par la violence. « Ils criaient en lingala et en swahili, exigeant de l’or et de l’argent liquide. Ceux qui résistaient étaient frappés », raconte une commerçante, dont la boutique a été vidée.
La stratégie des assaillants révèle une connaissance fine du terrain. « Ils ont ciblé des sites éloignés des axes principaux, où les communications sont rares et les secours presque inexistants », analyse un membre d’une ONG locale active dans la sécurisation des mines. Malgré les enquêtes ouvertes par la police nationale congolaise, aucun suspect n’a encore été arrêté. Pourtant, des questions persistent : Comment des quantités aussi importantes d’or ont-elles pu être écoulées sans laisser de traces ? Existe-t-il des complicités locales ?
Face à cette escalade, la chefferie Mari-Minza se retrouve à un carrefour critique. Les attaques répétées à Giro puis à Camp Djigba montrent que les bandits gagnent en audace. « Nous avons besoin de drones de surveillance, de patrouilles conjointes avec l’armée, et surtout, d’une vraie coopération entre mineurs et autorités », plaide un leader communautaire.
Mais au-delà des mesures sécuritaires, c’est tout un système à réformer. La légalisation des exploitations artisanales, la traçabilité de l’or et un meilleur partage des revenus miniers pourraient réduire la vulnérabilité de ces zones. « Si l’État ne protège pas ceux qui contribuent à l’économie, qui le fera ? », interroge amèrement un blessé hospitalisé à Ngangazo.
L’attaque du 21 février n’est pas qu’un fait divers sanglant : c’est le symptôme d’une crise systémique où se mêlent pauvreté, convoitise et défaillance étatique. Pour agir, des solutions existent : soutenir les ONG locales œuvrant pour la sécurité minière, exiger plus de transparence des acheteurs d’or, ou encore relayer les appels à l’aide des communautés. Comme le rappelle un proverbe congolais : « Un feu allumé par plusieurs mains ne craint pas le vent ». L’espoir réside dans l’union des forces — avant que d’autres nuits ne s’embrasent.
Par kilalopress